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Défaillances d'entreprises, la tendance haussière se poursuit

29 janv. 2018 Inforisk

En 9 ans, le nombre de défaillances a plus que triplé. Entre 2009 et aujourd’hui, ces faillites ont progressé de 16% en moyenne chaque année. En 2017, quelque 8.020 sociétés défaillantes ont été enregistrées, soit 12% en un an selon les données d’Inforisk que nous publions en exclusivité. 90% de ces cas sont des mises en liquidation, et 10% des redressements judiciaires.

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«Les défaillances au Maroc progressent d’environ 10% les bonnes années, et de plus de 20% pendant les années de morosité conjoncturelle. La hausse de «seulement» 12% en 2017 est donc plutôt une bonne nouvelle», estime Frédéric Louat, directeur général de Coface Maroc.

Les plus affectées par ces faillites sont les entreprises opérant dans le commerce, l’immobilier et le BTP. Ces trois secteurs alimentent 72% des défaillances, le commerce étant le plus touché avec plus du tiers des faillites en 2017. «Ce secteur est l’un des plus intégrés dans l’économie, surtout le commerce de gros qui dépend à la fois des délais de règlement du commerce de détail et de la conjoncture économique.

Et face à la crise, la consommation, hors produits de première nécessité, baisse», explique Frédéric Louat. «De plus, les activités de commerce fonctionnent structurellement avec de faibles marges bénéficiaires. Il a donc, par nature, une capacité de résilience plus réduite que les autres activités», indique-t-il. Même s’ils sont plus épargnés, l’industrie manufacturière et le transport & communications comptent, pour leur part, 540 entreprises en faillite chacun.

Le premier trimestre a été le plus mortel. A lui seul, il concentre plus du tiers des mises en liquidation et redressement judiciaire (2.571). En cause, l’explosion des défaillances au dernier trimestre de 2016 à plus de 53% qui s’est poursuivie durant les premiers mois de l’année. Parmi les autres facteurs, les difficultés de trésorerie et le blocage du gouvernement qui a mis à terre les entreprises dépendantes des marchés publics et dont la santé financière était fragile.

«Cette hausse sans précédent, peut-être imputée au vide gouvernemental, est amplifiée par la timidité des crédits bancaires de trésorerie», soulève le DG de Coface Maroc. «Mais depuis le 2ème trimestre de 2017, nous avons observé chez nos clients assurés un certain «retour à la normale» avec des taux d’impayés plus conformes à des tendances de long terme», souligne-t-il.

En effet, sur les trois autres trimestres, la tendance des défaillances a baissé pour s’établir à une moyenne de 2,4% d’avril à décembre, par rapport à 2016. «Une tendance proche de la moyenne mondiale qui, elle, est de 2,7%», indique Amine Diouri, responsable études et communications à Inforisk.

Le tiers des faillites concentré dans l’axe Casablanca-Rabat

C’est à Casablanca que le plus gros des défaillances a été enregistré (27%). Les faillites ont été aussi importantes dans les villes de Rabat (10%), Tanger (9%) et Marrakech (7%). Sans grande surprise, les principales victimes sont les petites structures. A elles seules, les TPE canalisent plus de 96% des défaillances d’entreprises, contre 3,2% pour les PME.

«Les TPE ont enregistré une baisse importante (-13%) de leurs chiffres d’affaires lors des deux dernières années, et leurs taux de marges nettes se rapprochent dangereusement de leurs niveaux les plus bas. En plus de cela, elles souffrent des délais de paiement particulièrement longs, 9,9 mois, voire 12 mois pour les marchés publics. Tous ces facteurs fragilisent ces structures», explique Amine Diouri.

Les grands groupes, eux, ne représentent que 0,2% des faillites. Parmi eux, l’on retrouve la raffinerie Samir, Charaf Corporation, entreprise de fabrication et de commercialisation des engrais, et Fertima, société marocaine des fertilisants, du même groupe. Les sociétés nouvellement créées sont les plus exposées aux défaillances.

En effet, parmi les 8.020 entreprises en faillite en 2017, la moitié ont moins de 5 ans d’existence, et le tiers entre 5 et 10 ans. 14% de celles ayant entre 10 et 20 ans ont mis la clé sous la porte. Les sociétés avec plus de 20 ans sur le marché restent les plus solides. Seulement 4% d’entres elles sont en redressement ou liquidation.

La mortalité des sociétés est principalement due à la baisse des marges, la progression des crédits bancaires et les délais de paiement. Selon les données d’Inforisk, en 2017, 40% des défaillances ont été engendrées par les défauts de paiement. «Le Maroc est un cas particulier, puisque les délais de paiement contractuels sont déjà très longs et continuent à s’allonger», affirme Frédéric Louat.

«Sur la base de nos observations sur le terrain, en tant qu’assureur-crédit, il est aujourd’hui quasiment certain que les retards de paiement, qui se répercutent par effet domino d’un secteur à un autre, constituent la première raison de la mortalité des entreprises marocaines», souligne-t-il.

Les derniers chiffres des délais de paiement de 2016 confirment cette donne. Les délais les plus longs sont enregistrés auprès des entreprises opérant dans le BTP, qui accusent près de 330 jours de retard, quasi autant pour le commerce (315 jours) et de quelque 294 jours pour l’immobilier .

Et enfin un autre indicateur de la morosité économique: aujourd’hui, seulement 4,5 entreprises se créent pour une disparition, alors qu’en 2009, pour une faillite, 10 sociétés voyaient le jour.

Le Maroc parmi les derniers de la classe

Par rapport au classement mondial, le Maroc compte parmi les pires élèves en matière de défaillances d’entreprises. Alors que la croissance des faillites dans le monde se situe à 2,7%, le Maroc, lui, enregistre une hausse de 12%. Il se place, ainsi, parmi les trois derniers, juste après la République tchèque et le Danemark (selon les données d’Inforisk et du réseau international Dun & Bradstreet qui couvre une trentaine de pays). «Dans la quasi-totalité des pays européens, le nombre de défaillances est en baisse depuis 2015. Au Maroc, en revanche, la mortalité des entreprises progresse à un rythme moyen de l'ordre de 17% depuis plus de dix ans», indique Fréderic Louat, directeur général de Coface Maroc.

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