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Défaut de paiement, à peine la moitié des créances est récupérée à l'amiable

3 mars 2016 Inforisk
Les dossiers confiés aux cabinets spécialisés en hausse de 15 à 20% sur une année. Les créances en souffrance des banques s’élèvent à 56 milliards de DH à fin 2015. Les sociétés de recouvrement fournissent deux à trois fois plus d’efforts pour arriver au même résultat.Se faire payer ses factures n’a jamais été aussi ardu ! Qu’il s’agisse de créances envers les banques ou d’engagements inter-entreprises, le défaut de paiement connaît une recrudescence particulière et culmine à des niveaux sans précédent. Selon les chiffres de Bank Al-Maghrib, les créances en souffrance des banques se montent à 56 milliards de DH en 2015, en hausse de 7% par rapport à 2014. Plus de 58% de ce stock est détenu par les entreprises privées, le reste par les particuliers. De son côté, Inforisk, dont la base de données compte plus de 320 000 bilans, a recensé 5 800 défaillances -incapacité à régler ses factures dans les délais convenus avec les partenaires commerciaux- sur 2015, en hausse de 15% par rapport à 2014, avec un rythme moyen de 500 chaque mois. En janvier 2016, on en était à 648 cas de défaut. Pour sa part, l’assureur-crédit Euler Hermès Acmar s’attend à une augmentation de ces défaillances de 10% au titre de l’année en cours.Les professionnels du recouvrement abondent dans le même sens. En 2015, le recours aux services de ces opérateurs spécialisés s’est accentué, étant donné que les entreprises peinent à recouvrer leurs fonds en utilisant leurs propres moyens. D’après les estimations recoupées, les dossiers confiés aux cabinets de la place sont en hausse de 15 à 20% sur une année. Pourtant, «une bonne partie des créances difficiles mais stratégiques reste traitée en interne. Seul le traitement de masse, en général des créances de moins de 1 MDH, est externalisé», souligne Jamal Krim, administrateur du cabinet RecoAct.Cette hausse des affaires confiées aux sociétés de recouvrement s’explique en premier lieu par les difficultés que traversent beaucoup de PME en proie à des soucis de trésorerie. «Ce n’est plus seulement l’Etat qui retarde les paiements, les multinationales et grands groupes commencent aussi à faire de même, ce qui élargit le cercle vicieux des défauts et finit par fragiliser davantage les PME», explique le DG d’un cabinet de recouvrement de la place.Les commissions sont rognées par la concurrence exacerbée qui prévaut sur le marchéAussi, plusieurs opérateurs rechignent, sans raison valable, à honorer leurs engagements pour garder les liquidités à portée de main, surtout en temps de crise. D’autres le font en connaissance de cause pour se financer sur le dos de leurs fournisseurs. «Il existe une autre catégorie de patrons invétérés qui se livrent à des activités de spéculation sur de courtes périodes de 2 à 4 mois avant de finir par payer leurs factures», informe le DG.Chez les particuliers, les spécialistes du recouvrement relèvent que les impayés recensés se justifient surtout par des périodes difficiles (chômage, maladie d’un proche, excès de dépenses…).Dans un tel contexte, les cabinets de recouvrement devraient en principe se frotter les mains. Ce n’est pourtant pas le cas, disent-ils. «Plus d’impayés ne nous apporte pas plus de chiffre d’affaires, les sociétés de recouvrement ont une obligation de résultat et ne sont donc payées que sur les créances récupérées», explique M. Krim. La profession dit même assister à une augmentation des charges fixes liée au nombre croissant des dossiers en portefeuille. «Sur les deux dernières années, il a fallu consentir deux à trois fois plus de moyens financiers, de temps et d’efforts pour maintenir le même niveau d’efficacité et, in fine, le même taux d’encaissement», assure l’administrateur de RecoAct, qui se plaint au passage de la difficulté à localiser les débiteurs. D’où des pertes de chiffre d’affaires. Si l’on réussit à localiser la personne ou l’entreprise au bout de 45 jours en moyenne, le taux d’encaissement s’établit à 30%, d’après les estimations des opérateurs. Au-delà, «les chances augmentent et plus de la moitié de la facture est souvent récupérée», estime un expert. En contrepartie, la rémunération de la prestation augmente. Toutefois, le niveau des commissions dépend du dossier, des parties en litige (particulier, entreprise ou établissement financier), de l’ancienneté de la créance et de la procédure à engager. «En raison de la concurrence très rude, les prix ont beaucoup baissé ces deux dernières années. Aujourd’hui, pour les dossiers inter-entreprises, la commission va de 5 à 15%. Pour les créances des sociétés financières, elle est de 10 à 15% parce que les montants sont généralement moins importants», confie Mostafa Kettani, gérant de la Centrale de recouvrement bancaire dont 90% du portefeuille est constitué d’établissements financiers.
En pratique, la créance impayée est gérée en interne par l’entreprise sur une durée moyenne d’un mois. Lorsqu’elle décide de faire appel à un spécialiste du recouvrement, elle donne à ce dernier un mandat ou une procuration aux fins de procéder aux opérations de recouvrement à l’amiable (du 2e mois au 5e) en plus, dans certains cas, de l’autorisation de placer le dossier au contentieux (du 6e au 9e mois). Outre l’intervention du cabinet à ces deux stades, l’offre sur le marché a évolué pour englober également le suivi de la facturation, la prévention et la gestion du risque client. Plusieurs opérateurs s’appliquent aujourd’hui à mener une gestion dynamique des créances. Selon la profession, les sociétés de recouvrement traitent environ un million d’affaires par an entre impayés de crédit, créances d’entreprises, chèques de grande distribution, factures de téléphonie mobile et primes d’assurance. Elles sont environ 300 aujourd’hui en activité, dont une vingtaine de structurées et ayant la taille critique pour réussir leur mission selon des standards professionnels. Le métier est non réglementé et l’accès libre.
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