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Délais de paiement, l'agonie des TPME se poursuit

16 janv. 2018 Inforisk

Le patronat a raison de s’attaquer aux délais de paiement des marchés publics, mais a tort de fermer les yeux sur ceux du privé. C’est à ce niveau que se situe le grand malaise. Les crédits inter-entreprises culminent à 387 milliards de DH. Ils ont augmenté de 45% depuis 2010, et représentent plus du tiers du PIB. Ce montant dépasse de 21% les crédits bancaires aux entreprises.

Les délais de paiement ne cessent de s’allonger, avec de grandes disparités selon la taille et le secteur d’activité. Les premiers à souffrir de ce mal sont les TPME. En 2016, les TPE ont accordé en moyenne 297 jours à leurs clients, contre 240 jours en 2012. Pour les PME, les délais se sont allongés de 18 jours en quatre ans, pour s’établir à 153 jours.

«De peur de perdre un client important, ces structures acceptent de subir cette pratique désastreuse, quitte à se mettre elles-mêmes en péril», explique Amine Diouri, responsable Etudes et communication d’Inforisk. Les grandes entreprises, pour leur part, se font payer en 102 jours. Mais elles sont l’une des principales causes des difficultés de trésorerie des petites entreprises, puisqu’en retour, elles règlent leurs factures très en retard.

Les premières victimes de ces retards de paiement sont les sociétés opérant dans le BTP avec des délais clients allant jusqu’à 11 mois. Ce secteur est l’un des plus touchés par la morosité de la conjoncture économique, et cela se ressent sur les

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En 2016, le rallongement des délais de paiement des TPE opérant dans le commerce est monté à 315 jours. Ce qui se traduit par la fermeture de 35% des entreprises du secteur

délais de paiement aussi. Dans le commerce, il faut compter au moins 315 jours pour être payé, et autant dans l’immobilier (294 jours). Ces délais, au-delà du raisonnable, ont une incidence forte sur la mortalité des entreprises, surtout les TPE.

Sans surprise, le commerce, le BTP et l’immobilier concentrent plus de 70% des défaillances d’entreprises. Les faillites augmentent en moyenne de 15% chaque année. «Ne pas agir urgemment consiste à regarder la majorité de notre tissu économique se fragiliser d’année en année. Inutile dans ce cas de parler d’investissement, d’innovation, d’exportation et encore moins de création d’emplois», déplore Diouri.

Aujourd’hui, aucun secteur ne respecte les délais réglementaires, et très peu d’entreprises ont le courage d’appliquer les pénalités de retard. Sans être dans les normes, l’hôtellerie et la restauration affichent les délais de paiement les moins élevés, avec tout de même 132 jours pour les PME et 153 jours pour les TPE.  «Pour nombre de TPME, le crédit inter-entreprises est devenu la 3e source de financement, derrière les fonds propres et les comptes courants d’associés», relève Amine Diouri.

La prédominance de cette pratique est surtout due aux difficultés qu’ont les TPME à lever des fonds, voire contracter un crédit bancaire. En effet, «généralement, les établissements financiers rechignent à financer les sociétés qui n’ont pas (forcément) les garanties requises (cautions personnelles, hypothèques, nantissements...)», tient à préciser Diouri.

tpe_delai_du_paiement_088.jpgPrès de 400 milliards de DH de crédit inter-entreprise en 2016, soit +21% des emprunts effectués auprès des banques. Un montant global en constante croissance depuis 2010.
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