DP, le trésorier payeur, ce maillon faible de la procédure

Faute de résoudre les facteurs de blocage dans toute la procédure, notamment au niveau du trésorier payeur, les efforts entrepris de part et d’autre seraient un jeu à somme nulle.

Tel un serpent de mer, la problématique des délais de paiement revient sans cesse dans les débats sur la conjoncture économique qui traverse une mauvaise passe. En attestent les différents rapports (BAM, Cour des comptes, CESE, HCP…) qui ont mis en exergue les défaillances et les fragilités structurelles de l’économie. Nombre de ces défaillances ont pour toile de fond la complexe problématique des délais de paiement dont sont responsables conjointement Etat et secteur privé.D’année en année, elle devient plus pressante et plus complexe. Comme expliqué par Amine Diouri, Directeur Etudes et Communications à Inforisk : « Je suis intimement convaincu depuis des années que cette question des délais de paiement est le point bloquant majeur pour nos entreprises. Faute de liquidités, elles ne peuvent ni recruter, ni investir et encore moins s’internationaliser… ». C’est dire que son impact sur le climat des affaires est indéniable puisqu’elle engage les entreprises dans un cercle vicieux.Après l’instauration de la loi 49-15 qui se traduit par l’application des intérêts de retard, la création d’un Observatoire de délais de paiement… les opérateurs commencent à voir le bout du tunnel. Ajoutons à cela la Circulaire adressée récemment par l’actuel ministre des finances Mohammed Benchaâboun aux Etablissements et entreprises publiques.Sauf que pour éradiquer le retard de paiement des Etablissements et entreprises publiques (EEP), il faut s’attaquer à d’autres variables de l’équation telle que la combinaison ordonnateur- trésorier payeur.Si l’Etat compte améliorer les délais de paiement, il doit intervenir sur la variable trésorier payeur empreinte de plusieurs anomalies :

• Le trésorier payeur avant de procéder au paiement se trouve face à une réglementation complexe qui exige de vérifier une panoplie de pièces et documents et de procéder à plusieurs opérations d’assurance (service fait, disponibilité de crédits, qualité des créanciers…). Une procédure qui s’étale dans le temps.
• Le trésorier payeur devant être légalement couvert dans l’exercice de sa mission ne dispose malheureusement pas d’une assurance pour se protéger contre les risques inhérents à son métier. Avant de signer un document et d’engager sa responsabilité, il prend tout son temps pour s’entourer de toutes les sécurités nécessaires et ne pas tomber sous le coup de la loi sur les responsabilités des ordonnateurs et des comptables publics.
• Le trésorier payeur accompagne généralement trois à quatre établissements. Ce qui se traduit par une charge de travail colossale et qui implique des rallongements des délais de paiement.
• Le trésorier payeur ne dispose pas, dans plusieurs cas, d’une équipe dédiée pour l’épauler dans l’exécution de sa mission. Il se trouve seul à gérer les différentes phases de la procédure.
• Lorsque le trésorier payeur est en congé, un trésorier est nommé par intérim. Généralement, ce dernier se contente de signer de simples factures (téléphone, paie…) et du coup, le retard ne fait que s’amplifier.
• Au début de chaque année budgétaire, les paiements sont bloqués pendant au moins deux mois en raison de l’indisponibilité d’un état majeur de la comptabilité publique, en l’occurrence l’état du reste à payer. Ce dernier devant renfermer toutes les factures et décomptes exigibles et non encore honorées à la fin de l’exercice écoulé.

Pour remédier à cette situation et par voie de conséquence, améliorer les délais de paiement, il est recommandé d’assouplir les procédures réglementaires de paiement, renforcer le corps du trésorier payeur, voire réviser la réglementation du contrôle financier de l’Etat.Une chose est sûre : ne pas prendre en considération les points ci-dessus se traduirait par des efforts à somme nulle.