La nouvelle maladie du coronavirus implique dépistage et traitements qui n’ont toujours pas été intégrés dans les systèmes de remboursement des organismes de santé ou des assurances.
Pour l’heure, seule la CNOPS (Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale) a déclaré prendre en charge au profit de ses assurés les frais des prestations médicales liées à la pandémie du covid-19, après avoir annoncé dans un premier temps leur non remboursement.
Hormis cette catégorie, ainsi que les employés des entreprises ayant organisé des dépistages collectifs, ou encore les patients qui passent par le circuit covid-19 de la Santé publique, le test PCR reste à la charge du citoyen.
A titre d’exemples, le gouvernement français assure le remboursement à 100% des tests PCR (et sérologique sur ordonnance) sans avance de frais pour la grande majorité des laboratoires. Il peut s’effectuer sans ordonnance lorsqu’il s’agit de cas contact avec risque élevé de transmission. En Allemagne et en Espagne, cibler est la stratégie, et pour bénéficier de tests gratuits, il faut présenter des symptômes ou avoir été en contact avec une personne contaminée.
Au Maroc, le test PCR n’est (toujours) pas remboursé pour tout citoyen se faisant tester hors circuit public, même sur prescription médicale. Il doit ainsi débourser environ 700 DH en fonction des laboratoires (680 DH étant le tarif de référence et 800 DH le plafond fixé par les autorités). «Un montant que ne peut se permettre une famille en situation précaire», souligne Dr. Taieb Hamdi, président du Syndicat national des médecins généralistes, qui plaide pour la mise en place d’un système de tiers payant.
A ce propos, le spécialiste soulève un double problème: le manque «d’engouement des laboratoires privés pour effectuer ces analyses», et leur prix relativement cher qui n’incite pas les citoyens au dépistage. «En fin de compte, l’élargissement du dépistage aux laboratoires privés n’a pas permis d’augmenter la capacité de tests, ni d’accélérer le processus, parce que justement la prise en charge n’est pas assurée par le mode du tiers payant», constate le spécialiste qui rappelle que ce mode est déjà adopté au Maroc pour le remboursement des frais d’hospitalisation et des traitement des maladies chroniques.
En juillet dernier, Dr. Hamdi avait suggéré l’élaboration d’une convention, entre d’un côté, la CNSS, la CNOPS, et de l’autre, les laboratoires privés, afin de mettre en place un système de tiers-payant pour la prise en charge du test PCR. «L’assurance payerait directement le laboratoire et l’assuré n’aurait pas à avancer les frais, ou juste une petite partie. L’absence de tiers-payant est un obstacle majeur qui empêche les assurés, qui payent chaque mois leur cotisation, de bénéficier du dépistage car ils n’ont pas les moyens d’avancer les frais», regrette notre interlocuteur.
«J’ai pris l’initiative d’aller me faire tester dans un laboratoire privé car une amie proche a été diagnostiquée positive au coronavirus. J’ai payé 650 DH, un prix assez élevé alors que nous ne sommes pas remboursés», illustre une jeune Casablancaise.
«Avec un test à 700 ou 800 DH, un chef de famille peut vite dépasser les 2.000 DH. Payer cette somme et attendre le remboursement n’est pas à la portée des Marocains, même pour les personnes assurées», réitère Dr. Hamdi, qui estime que 95% des patients à qui les médecins généralistes prescrivent des tests PCR vont les faire dans les cellules covid-19 des hôpitaux publics. «Investir dans un partenariat caisses d’assurance maladie et laboratoires permettrait de désengorger le secteur public», relève le chercheur en politiques et systèmes de santé.
Certains médias ont rapporté le mois dernier la création d’une commission composée du ministère de la Santé, la CNSS, la CNOPS et l’ANAM, dans le but de réfléchir ensemble à un système de remboursement des frais liés au covid-19. Selon nos confrères de L’Opinion, les modalités de remboursement seront conditionnées par les prescriptions des médecins habilités, sauf en cas de dépistage massif d’une zone définie qui restera à la charge de l’Etat.
Selon le site EcoActu, cette commission est présidée par l’ANAM et travaille sur les protocoles thérapeutiques de référence qui permettront de fixer la base des remboursements suivant cinq catégories de cas (en cours de validation): asymptomatique, bénin, modéré, sévère et critique. «Pour chaque catégorie il y aura un référentiel du protocole qui sera la base du remboursement», fait savoir une source à l’ANAM auprès du média.
«J’ai entendu parler de cette commission mais jusqu’à maintenant on n’a rien de concret», commente Hamdi. Pour le moment, aucune communication officielle à cet égard n’a été publiée. Contactées par H24Info, des sources auprès du ministère de la Santé n’ont toujours pas répondu à nos questions.