«Les banques et les investisseurs en capital ne sont pas les bons interlocuteurs pour mobiliser des fonds pour entreprendre», conseille un expert de la Banque mondiale à des dirigeants de startup. Le financement d'une idée a très peu de chance d'aboutir chez une banque, le risque étant jugé trop élevé.
Du côté de l'industrie du capital investissement, les entreprises en phase d'amorçage et risque captent moins de 10% des investissements. Il faut nuancer ce chiffre par les besoins des startups qui sont généralement peu conséquents.
S'il y a un bouillonnement dans le secteur de l'innovation ces dernières années, le financement reste une contrainte majeure. La difficulté est parfois accentuée par l'incohérence de l'action publique. «Il y a des administrations qui vous poussent pendant que d'autres vous freinent», racontent de jeunes entrepreneurs.
L'absence d'un cadre réglementaire adéquat complique l'accès à certaines sources de financement, notamment les fonds d'investissement. Ils sont plus enclins à investir dans les entreprises constituées en société anonyme. Or, cette forme juridique est lourde pour la startup puisqu'elle requiert la désignation de commissaires aux comptes ou encore une gouvernance avec conseil d'administration.
«Les fonds préfèrent le statut de société anonyme parce que c'est un gage de transparence et de bonne gouvernance. C'est une démarche structurante pour les porteurs de projets et elle vise aussi à préparer la sortie dans de bonnes conditions, puisque les fonds ont un horizon d'investissement limité», indique Khalil Azzouzi, associé à Azur Partners et consultant en fusion-acquisition.
Il y a un effort à effectuer de chaque côté pour rapprocher les attentes. En général, «les fonds sont sollicités en dernier recours après les échecs de levée de fonds auprès des banques notamment», relève un professionnel. Par ailleurs, certaines expériences ont renforcé la prudence de ces bailleurs de fonds. Le facteur humain serait principalement en cause.
«Les comportements des porteurs de projets évoluent au fil des années. Nous avons parfois des conduites qui sont insaisissables et qu'on ne peut pas appréhender, raison pour laquelle nous exigeons la mise en place de pactes d'actionnaires», explique Azzouzi.
Aujourd'hui, les startups se reposent beaucoup sur les fonds propres pour faire avancer leurs projets. Le développement des mécanismes publics permet de résoudre en partie le problème de financement de l'innovation. Mais les entrepreneurs regrettent le manque de réactivité. Leur dynamisme se heurte parfois à un processus de sélection et de déblocage des fonds qui peut être très long pour une startup.
«Nous sommes conscients des attentes des entrepreneurs en matière de célérité dans le traitement de leurs demandes. Nous avons instauré un système d'échange fluide et rapide de traitement des demandes avec les six structures d'accompagnement labellisées. Généralement, le délai moyen de traitement par ces structures des demandes de financement ne dépasse par un mois.
Les dossiers validés et transmis à la CCG sont traités dans un délai maximal de 10 jours ouvrables», rétorque la CCG. «Les jeunes entrepreneurs arrivent parfois avec une histoire qui n'a pas encore bien mûri dans leur tête. Il y a un travail en profondeur sur le business modèle, le marché... qui doit être effectué et ne peut être réduit à moins de six mois», souligne de son côté un spécialiste du capital risque.
Amorçage/Risque: Un rendement brut de 1%
Le Fonds Innov Invest, géré par la Caisse centrale de garantie, est le principal véhicule dédié au financement de l'innovation. Il a une taille de 500 millions de DH. L'appui aux porteurs de projets s'effectue à travers des aides et des prêts d'honneur.
Depuis le lancement du fonds en octobre 2017, les structures d'accompagnement labellisées ont agréé 18 projets pour un volume de financement de 3,8 millions de DH. Les fonds d'amorçage et de capital risque vont investir 7 tickets avant la fin de l'année, indique la CCG. Par ailleurs, la Caisse veut mettre en place un réseau de business angels pour renforcer son action à l'endroit des startups.
Ces dernières années, des initiatives émergent du secteur privé notamment de grands groupes qui prennent sous leurs ailes des pépites. En même temps, «il y a beaucoup d'affichage et peu d'actions concrètes derrière», regrettent certains porteurs de projets. La prise de risque est encore limitée. C'est un secteur dans lequel la casse est élevée.
Même si les volumes globaux restent peu significatifs, le ticket moyen investi par capital investisseurs dans les entreprises en phase amorçage/risque a pratiquement doublé entre la 2e et la 3e génération de fonds pour s'établir à 13 millions de DH. Le taux de rendement interne brut pour les entreprises investies à ce stade s'est établi à 1% à fin 2017.